Prince Félix Youssoupov
Le prince Félix Felixovitch Youssoupov est le fils du comte Felix Felixovitch Soumarokov-Elston, prince Youssoupov (1856-1928) et de la princesse Zénaïde Nikolaïevna Youssoupova (1861-1939).
La mère du prince Félix Felixovitch, la princesse Zénaïde, était réputée plus riche que le tsar lui-même. En 1917, sa fortune était estimée à 600 millions de dollars de l’époque, qui comptait très peu de milliardaires, et était composée de plusieurs millions d’hectares de terres — une des propriétés Youssoupov, sur les rives de la mer Caspienne, s’étendait sur près de 250 kilomètres de long —, de participations dans plus de 3 000 sociétés, de quartiers entiers de Moscou et Saint-Pétersbourg et d’une superbe collection d’œuvres d'art.
En Russie, on disait du prince Félix Felixovitch Youssoupov qu'il était « le plus bel homme de tout l'Empire ». Durant sa jeuness, il mène une vie extravagante, scandalisant son entourage par sa vie dissolue. Dans son autobiographie, il explique avoir passé beaucoup de temps avec les tziganes. Sa beauté et son aspect androgyne, sa taille souple lui donnent la possibilité de se travestir en femme. Il aime revêtir les robes et les bijoux de sa mère ; ainsi paré, il se rend dans différents restaurants et autres célèbres endroits de Saint-Pétersbourg, captant l'intérêt des officiers de la garde impériale, ces derniers se méprenant sur sa véritable identité lui faisaient une cour empressée. Il semblerait que son frère aîné et sa jeune maîtresse Polia l'aient incité à se travestir. Selon d'autres sources, la princesse Zénaïde espérait une fille, mais c'est un garçon ; elle lui donne le prénom de Félix mais l'habille en fille jusqu'à l'âge de cinq ans, ce qui, pour certains, expliquerait les tendances du jeune homme pour les travestissements15. Il s’amuse également à errer dans Saint-Pétersbourg déguisé en mendiant. Il consomme volontiers de l'opium. Après son union avec la grande-duchesse Irina Alexandrovna de Russie, il continue à avoir des aventures homosexuelles.
Félix Youssoupov se fiance avec la nièce de Nicolas II, la princesse Irène, jeune fille d'une rare beauté. Le 22 février 1914, le mariage est célébré avec le consentement de l'empereur en l'église du palais Anitchkov. Des mains du tsar, le couple reçoit en cadeau de mariage un sac contenant vingt-neuf diamants. De cette union naît la princesse Irène Félixovna, future épouse du comte Nicolas Dmitrievitch Cheremetiev, décédée en 1983. Le couple Youssoupov, pourtant si dissemblable de caractère,résiste à toutes les épreuves. Uni à une des plus belles princesses de l'Empire, ce prince si futile restera jusqu'au terme de sa vie un époux respectueux, éprouvant des sentiments très forts pour son épouse.
Félix Youssoupov souffre de l’ascendant qu’exerce Raspoutine sur la famille impériale et plonge dans une profonde tristesse. Le starets, selon lui, envoûte la tsarine et met en péril le trône de Russie. En contribuant au meurtre de Raspoutine, Félix Felixovitch Youssoupov exerce sans doute une vengeance. Son père, le gouverneur-général de Moscou, avait été spectaculairement limogé en 1915 pour avoir critiqué le régime impérial. Sa mère, la princesse Zenaïde, avait également été déclarée indésirable à la cour après avoir demandé à la tsarine de renvoyer Raspoutine.
Avec le grand-duc Dimitri Pavlovitch, le député Vladimir Pourichkevitch, le lieutenant Sergueï Soukhotine et le docteur Stanislas Lazovert, le prince Ioussoupov organise l’assassinat de Raspoutine dans la nuit du 29 au 30 décembre 1916. Bien que le prince se soit attribué ce meurtre, c'est en fait Oswald Rayner, son ami londonien, membre des services secrets britanniques, qui achève Raspoutine.
Le 11 avril 1919, il quitte la Russie à bord d’un cuirassé de la Royal Navy, le HMS Marlborough envoyé à Yalta (Crimée) par le roi d’Angleterre pour sauver ses cousins russes, membres de la famille impériale. Installé dans un premier temps à Londres, le prince Youssoupov est une des chevilles ouvrières de la Croix-Rouge russe. En 1920, il s’établit avec sa femme à Paris où il crée en 1924 la maison de couture Irfé (Ir pour Irina - Fé pour Félix). Son épouse lui sert de mannequin pour présenter les différents modèles de ses collections. Ami de Kessel, Cocteau ou de Boniface de Castellane, il reste, jusqu’à sa mort et malgré son refus de tout engagement politique, une des grandes figures de l’émigration russe et de la société mondaine parisienne. les Youssoupov réussissent à sauver nombre d’objets précieux, au premier rang desquels on trouve deux Rembrandt, vendus au début des années 1920. En 1953, la perle Pelegrina nommée La Régente ou "Perle Napoléon", fut elle aussi vendue. Cette perle achetée aux enchères en 1887 par le joaillier Pierre-Karl Fabergé fut achetée par la famille Youssoupov, la princesse Zénaïde la portait en pendentif ou en sautoir ou encore comme ornementation dans sa coiffure. Ces ventes leur assurent de solides moyens de subsistance. La charité du prince Ioussoupov, bien que discrète, est importante. Ainsi, il se rend au chevet des malades dépourvus de famille et il aide financièrement le grand-duc Théodore Alexandrovitch qui vit dans la pauvreté. Anticommuniste viscéral et résolument antinazi, il donne également d'importantes sommes d'argent à des mouvements de résistance.
L’assassinat de Raspoutine hantera le prince Youssoupov jusqu’à sa mort : il est en proie à des cauchemars tenaces et peint des tableaux inquiétants représentant des monstres mi-homme, mi-animal. Ne pouvant plus supporter ces tableaux représentant des figures hideuses, sa fille les vendra à la mort de ses parents.