Serge Lifar
Serge Lifar (en russe Sergueï Mikhaïlovitch Lifar) est un danseur, chorégraphe et pédagogue russe naturalisé français. Il a souvent été décrit comme un danseur d'une grande beauté physique et doté d'une présence rayonnante, l'un des plus importants de sa génération.
Après avoir été l'élève à Kiev de Bronislava Nijinska, la sœur du grand Vaslav Nijinski, il quitta, tout comme elle, la Russie en 1921. Il se présenta chez Serge de Diaghilev. Sur son indication Lifar se rendit à Turin, où il travailla à l'amélioration de ses connaissances techniques, sous la direction d'Enrico Cecchetti (1850-1928). Il débuta en 1923 au sein des Ballets russes et devint rapidement premier danseur. Il créa ensuite les principaux rôles dans des ballets de George Balanchine, et composa sa première chorégraphie, une reprise du ballet Renard, en 1929. La mort de Diaghilev entraîna la disparition des Ballets russes. Pendant que d'autres, comme Boris Kochno ou Balanchine, s'efforcèrent de recréer de nouveaux Ballets russes, Lifar se fit engager par l'Opéra de Paris. Nommé maître de ballet de l'Opéra de Paris, de 1930 à 1944 et de 1947 à 1958, il s'employa à restaurer le niveau technique du Ballet de l'Opéra de Paris pour en faire, dans les années 1930, l'un des meilleurs du monde. Yvette Chauviré, Janine Charrat, Roland Petit, entre autres, ont incontestablement subi son influence. Au cours de sa double carrière d'interprète et de chorégraphe, il passa 16 ans à l'Opéra de Paris, comme premier danseur d'abord en 1929, puis comme danseur étoile, enfin comme maître de ballet de 1930 à 1944 et de 1947 à 1958.
Lorsque la France signa l'armistice en 1940, Lifar fit le choix de la collaboration avec les allemands. Il devint l'une des « vedettes » de la vie culturelle et mondaine parisienne, où officiers allemands et collaborateurs se côtoyaient. Tout au long du conflit, Radio Londres a fustigé Lifar et sa collaboration avec l'occupant, lui promettant la mort. Inévitablement, à la Libération, il fut sans autre forme de procès licencié de l'Opéra et « rayé à vie des scènes nationales » alors qu'un de ses jeunes admirateurs, Robert Hirsch, auditionne pour entrer dans le corps de ballet et y est reçu. Lifar se cacha dans Paris chez plusieurs amies ballerines. Une instruction judiciaire fut ouverte afin d'examiner sa conduite, qui se termina par un non-lieu ; il avait entre-temps échappé à l'arrestation.
Afin de se faire oublier, Lifar se fit engager comme directeur des Ballets de Monte-Carlo, mais pas pour longtemps, car dès 1947, il « rentrait en grâce », et retrouvait son poste de maître des ballets de l'Opéra. Il obtint de la direction de l'Opéra de Paris quelques réformes importantes, dont la création d'une classe d'adage - grâce à lui, le danseur n’est plus le « faire-valoir » de la ballerine et l'instauration d'une soirée hebdomadaire réservée exclusivement à la danse. En 1955, une chaire lui sera confiée à la Sorbonne, pour l'étude de la chorégraphie-chorélogie, science de la danse. Il fit ses adieux à la scène en 1956, dans le rôle d'Albert de Giselle.
Il poursuivit son activité chorégraphique à travers le monde jusqu'en 1969, puis fonda et anima avec passion l'Institut chorégraphique de l'Opéra et l'université de la danse.
En 1967, il dirigea les ballets lors du couronnement impérial à Téhéran du shah d'Iran.
Rapporté abondamment dans les journaux de l'époque, un duel à l'épée entre le marquis de Cuevas et Serge Lifar eut lieu le 30 mars 1959. Les deux hommes réglaient ainsi un différend artistique, en présence de nombreux photographes de presse et d'une caméra. La querelle avait pour origine un désaccord au sujet de la reprise du ballet de Lifar Noir et Blanc (ou Suite en blanc) par le Grand Ballet du marquis de Cuevas. Au cours d'une discussion assez vive, le marquis avait asséné une gifle à Lifar, qui exigea réparation sur le pré. Cuevas avait alors 73 ans, Lifar 54. La date fut fixée au 30 mars et la rencontre eut lieu à Blaru, près de Vernon en Normandie. Au bout de trois reprises, Lifar se laissa toucher à l'avant bras. « J'ai cru percer mon fils » déclara le marquis, et ils tombèrent dans les bras l'un de l'autre.
En 1958, Lifar fit la connaissance d'Inge Lisa Nymberg qui devint son amie et son « ange gardien », sous le nom de comtesse d'Ahlefeldt-Laurvig, à la suite d'un mariage de courte durée avec le comte danois de ce nom. S'estimant trop peu apprécié à Paris, Lifar habita une dizaine d'années à Monte-Carlo, puis, après un bref retour à Paris, le couple alla s'installer à Lausanne, où il se préoccupa principalement de la rédaction de ses mémoires. C'est dans cette ville qu'il mourut.